En face à face avec Leïla Tricot, Néphrologue à l’Hôpital Foch, à l’occasion de la semaine nationale du rein

mars 9, 2023 - Adèle Lefeuvre

La semaine nationale du rein, du 4 au 11 mars, à l'initiative de France Rein, est l’occasion de mettre en avant l’importance du dépistage des maladies rénales chroniques mais également l’importance de leur suivi.

Le Dr Leïla Tricot, spécialiste en néphrologie, dialyse, transplantation, hypertension artérielle à l'hôpital Foch à Suresnes, nous a accordé un entretien pour parler de la pathologie, de son suivi et du métier de néphrologue.

"On estime que 7 à 10% de la population française présenterait une atteinte rénale."*


En quoi consiste la Semaine nationale du rein qui a débuté ce samedi 4 mars partout en France ?

Pour les personnes qui ne se savent pas atteintes, le dépistage auprès du grand public permet de dépister des patients qui ont des facteurs de risque de maladie rénale (hypertension, diabète, obésité) et/ou une maladie rénale méconnue (albumine dans les urines)

C’est essentiel, car l’insuffisance rénale est silencieuse et peut passer complètement inaperçue jusqu’à un stade très avancé, voire même à un stade où il faut démarrer les traitements de suppléance.

À la suite de ce dépistage, les résultats pourront être adressés à leur médecin généraliste afin qu’ils soient pris en charge par ce dernier et/ou par un néphrologue, selon le degré de sévérité de leur insuffisance rénale. Les bonnes mesures de protection rénale pourront ensuite être mises en place.

"L’insuffisance rénale est silencieuse et peut passer complètement inaperçue jusqu’à un stade très avancé, voire même à un stade où il faut démarrer les traitements de suppléance"

La semaine du rein a débuté samedi 4 mars, partout en France, l’Hôpital Foch a-t-il prévu des événements particuliers à cette occasion ?  

Pendant la Semaine Nationale du Rein, nous organisons des événements pour les soignants d’une part et les patients d’autre part.

Deux podcasts sur la prévention et le dépistage vont être diffusés en interne et sur les réseaux sociaux. https://www.podcastics.com/podcast/episode/insuffisance-renale-chronique-ce-quil-faut-savoir-227924/

Le jeudi 9 mars, nous aurons une action de dépistage au Centre Médical Foch La Défense tout au long de la journée. Par des moyens très simples (questionnaire, mesure de la tension artérielle et bandelette urinaire), nous pourrons alerter les personnes qui se présenteront sur la présence d’une maladie rénale.
Nous serons plusieurs sur place : 2 néphrologues, un patient expert de la maladie rénale, formé à l’hôpital Foch et notre IPA (Infirmière en Pratique Avancée) et une IPA en cours de formation. Cette démarche s’inscrit dans cette Semaine Nationale du Rein, pour dépister les patients, et sensibiliser le public aux maladies rénales. 

Ces actions de dépistage auront lieu dans toute l’Île-de-France et dans différents endroits, pas seulement à l’hôpital, mais aussi dans des centres de santé, dans des foyers de travailleurs immigrés, plus difficiles à atteindre que les patients suivis par les médecins généralistes ou nos confrères. 

Le réseau RENIF (Rein Île-de-France) a pour missions le dépistage et l’accompagnement de la maladie rénale chronique. Il est très actif et nous fournit une aide logistique précieuse, notamment les questionnaires de dépistage qui seront ensuite transmis au médecin traitant des patients.

Quel est le suivi type dun patient atteint dinsuffisance rénale ? 

Au fur et à mesure que l’insuffisance rénale s’aggrave, les consultations avec le néphrologue doivent être plus fréquentes. Elles permettent d’accompagner le patient, de dépister les complications, notamment cardiovasculaires, et de mettre en œuvre les traitements des différentes complications de la maladie rénale chronique. Les différentes fonctions des reins, - épuration des toxines, contrôle de la tension artérielle et sécrétion de l’EPO,- s’altèrent progressivement avec l’aggravation de la maladie, ce qui demande d’ajuster les traitements au fur et à mesure de l’évolution.

Ces consultations sont au moins trimestrielles, voire bimensuelles ou mensuelles aux stades avancés de la maladie (stades IV et V).

Pouvez-vous nous expliquer en quoi ce suivi est essentiel ? 

Nous disposons aujourd’hui de médicaments qui ralentissent efficacement l’évolution de la maladie et donc l’échéance de l’insuffisance rénale terminale (moment où le patient doit mettre en œuvre des traitements de suppléance, qui vont remplacer le travail du rein : les différentes modalités de dialyse ou transplantation rénale).

Ce suivi est essentiel, car en donnant des conseils et en vérifiant que le patient les applique correctement, en terme de prise de médicaments, d’équilibre de la tension, d’alimentation équilibrée (notamment en réduisant les protéines), on ralentit la maladie.

En quelques mots, pouvez-vous nous décrire une semaine type de votre quotidien au travail ? 

Pour ma part, j’interviens essentiellement en consultations pour le suivi de patients, à tous les stades de la maladie, précoces ou avancés.

En suivi de la maladie rénale chronique, je peux avoir de nouveaux patients qui sont adressés par des médecins généralistes ou des cardiologues qui ont dépisté une maladie rénale. Je suis amenée à rechercher l’origine de la pathologie, parfois à l’aide d’une biopsie rénale(1), préciser sa sévérité, et mettre en œuvre les traitements adaptés.

Je vois de façon régulière les patients ayant déjà une maladie diagnostiquée pour ralentir l’évolution, vérifier que les médicaments sont bien pris, notamment ceux qui sont protecteurs, et identifier d’éventuels facteurs d’aggravation.

J’interviens aussi en consultations pré-greffe, c’est-à-dire que je vais recevoir des patients parfois accompagnés, pour évaluer la possibilité de les greffer et de les inscrire sur la liste d’attente nationale de transplantation rénale. 

J’assure une consultation hebdomadaire à l’hôpital d’Argenteuil.

J’interviens enfin en hémodialyse chronique(2), où je vois les patients dialysés chaque semaine. 


(1) La ponction biopsie rénale (PBR) est un prélèvement d’un (ou plusieurs) petit fragment de tissu rénal pour en faire une analyse histologique dans un but diagnostic et de suivi. (https://centre.chl.lu/fr/dossier/la-ponction-biopsie-renale-pbr

(2) L’hémodialyse (HD) consiste à épurer le sang du ou de la patient-e à l’aide d’un rein artificiel. Trois séances d'une durée de 3h30 à 4h30 heures sont nécessaires chaque semaine pour remplacer le travail que font les reins 24h sur 24. (https://www.chuv.ch/fr/nephrologie/nep-home/patients-et-famille/consultations/hemodialyse-chronique)

*https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2021-09/guide__mrc.pdf


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